dimanche 18 août 2013

BURKINA FASO: Blaise Compaoré ou le Parrain de la sous-région (1)

J'ai lu un article qui m'a vraiment marqué. Le Dr Serge Nicolas Nzi en est l'auteur. J'aime cet article, parce qu'il est d'un réalisme à vous couper le souffle. A travers cet écrit, nous autres, profanes de la réal politique arrivons à comprendre un peu certaines choses. Le Dr Serge Nicolas nous plonge dans l'univers impitoyable de la gouvernance selon Blaise Compaoré, l'homme fort du Burkina Faso depuis 1987 et comme il le dit "le parrain de la sous-région ouest africaine". Le Dr Serge Nicolas Nzi a bâtit sa réflexion autour de cinq (5) points, dans cette publication, je me suis intéressé au deux (2) premiers points à savoir: Le Portrait pour connaître l'homme Compaoré (I), De la doctrine Compaoré, parlons-en (II). Qui est Blaise Compaoré? Comment opère-t-il? autant d'interrogations que l'écrit de monsieur Nzi tente d'apporter des réponses. Lisons plutôt.

NB: Je précise qu'en dehors des photos d'illustration, le sourire du jour et des légendes, tout le reste est du Dr Serge Nicolas Nzi. Article mis en ligne sur le site www.connectionivoirienne.net le 25 juillet, 2013 à 21:00

"Compaoré ou le Tueur froid de Ouagadougou
  
Dans l’histoire contemporaine de l’Afrique, Il y a eu ceux qui ont tué pour exister et surtout ceux qui sont arrivés au pouvoir par le meurtre et le sang des autres. Leur parcours est jonché de cadavres, parmi eux émergent incontestablement des tueurs froids comme Idi Amin Dada, en Ouganda.Le tout puissant, Amadou Ahidjo et le Cameroun totalement Bâillonné. Joseph Désiré Mobutu dans le Zaïre qui était carrément sa propriété. Etienne Gnassingbé Eyadema et son Togo, Mengistu Hailé Mariam et l’Ethiopie, Blaise Compaoré et son Burkina Faso, ainsi que Samuel Kanon Doe et le Liberia. La liste est tellement longue qu’une nausée s’empare de nous rien qu’à l’évocation de telles créatures. La recomposition politique de la sous-région Ouest africaine, nous oblige à connaître la nature des hommes pour comprendre les mutations futures ainsi que les derniers bouleversements qui ont ébranlé cette partie de notre continent. Dans cette démarche Blaise Compaoré, reste un homme à suivre et à observer de près comme du lait sur le feu.

Louise Arbour, la présidente de la célèbre (ICG) l’ONG International Crisis Group, a déclaré dans l’international Herald Tribune que :   
"M. Compaoré qui a été un militaire, meneur d’un coup d’Etat sanglant et parrain politique de Charles Taylor (l’ex chef rebelle et ancien président du Liberia actuellement jugé pour crime contre l’humanité) n’est pas l’homme le plus fiable pour prêcher la démocratie, les droit de l’homme et favoriser le pouvoir civil"
Pourquoi tant de méfiances à l’endroit d’un homme, qui a présidé plusieurs organisations politiques et économiques sur le continent ? On peut citer, la présidence de l’OUA entre 1998 et 1999. L’Autorité du Liptako-Gourma. Conseil de l’entente, UEMOA, la Communauté des Etats Sahélo-Sahariens. La Communauté économique des États de l’Afrique de L’Ouest (CEDEAO), Médiateur dans la crise institutionnelle du Niger. Médiateur dans le dialogue inter togolais. Médiateur dans la crise ivoirienne. Promoteur des accords de Ouagadougou. Médiateur dans la crise Guinéenne. Certains se demandent "Mais que veut donc Compaoré ?"
Blaise Compaoré, Président du Burkina Faso depuis 1987
Il demeure une énigme pour beaucoup de ses propres compatriotes et pour tous ceux qui observent la sous région Ouest africaine. En réalité il y a une << doctrine Compaoré >>. C’est en interrogeant ceux qui l’ont pratiqué et fréquenté et en recoupant un certain nombre d’informations que nous comprenons mieux la doctrine du pompier pyromane de Ouagadougou, qui est l’homme fort de la patrie des hommes intègres mais aussi l’assassin de Thomas Sankara.
I – Portrait pour connaître l’homme Compaoré
Blaise Compaoré, est dans sa soixantième année. Il est né le 13 février 1951, à Ziniaré au nord de Ouagadougou. C’est un homme qui cultive le secret, depuis l’après midi sanglant du 15 octobre 1987, il règne sans partage sur l’indomptable Burkina Faso. Sa politique et sa façon de rebondir pour gouverner l’ingouvernable en maître absolu surprennent l’Afrique entière.
L’homme est de grande taille, a le teint un peu clair pour un sahélien originaire du plateau central de la province d’ Oubritenga au Burkina Faso. Le visage dégagé laisse apparaître un léger embonpoint que surplombe un front large, des yeux pétillants d’intelligence et de fermeté. Son menton qu’il porte souvent haut trahit un tempérament autoritaire, il a un comportement timide et réservé, sa démarche calme est presque majestueuse. Courtois, n’élevant jamais la voix, il pourrait passer pour un terne.Elégant dans sa mise aussi bien en tenue militaire, traditionnelle ou en costume cravate, il garde l’empreinte de ses origines paysannes et de sa formation militaire. Les cheveux coupés dans le style sommaire des casernes, sont bien teints en noir, il donne une petite impression de lourdeur que dément le regard rusé d’un tueur froid aux prises avec l’orage et familier des menaces de ses adversaires.Il a un sens aigue de sa dignité. Sa personne et sa famille sont des choses plus que sacrées à ses yeux. Demandez au journaliste Norbert Zongo, carbonisé avec ses compagnons dans son véhicule 4×4, sur la route de Sissily, non loin de Sapouy le dimanche 13 décembre 1998 et il vous dira mieux que nous qu’on ne s’attaque pas impunément au maître de Ouagadougou et aux membres de sa famille. 
 
Implacable, le Président Burkinabé exécute ses desseins avec patience et obstination. Il a bâtit son pouvoir pierre par pierre, Compaoré ne se précipite jamais, ne s’émeut guère et ne s’emporte jamais en public. Il préfère parvenir à ses fins en douceur avant de recourir à la dissuasion et au besoin par l’élimination pure et simple de l’adversaire. Ses premiers compagnons de route furent les premières victimes du tueur froid. Les capitaines, Thomas Sankara (assassiné en octobre 1987), Jean-Baptiste Lingani (exécuté en septembre 1989) et le Commandant Henri Zongo (exécuté en septembre 1989), se souviendront du fond de leurs tombes de la méthode Compaoré.Il aime digérer sa proie, c’est justement pour cela qu’il sait attendre les occasions propices avant de porter le coup de boutoir final. Pour cela il explore l’adversaire en le laissant s’enfermer dans ses contradictions et le mettre ainsi en position de faiblesse s’il doit négocier avec lui. Il choisi admirablement son moment d’attaque.

"Il sait attendre les occasions propices avant de porter le coup de boutoir final"
Laurent Gbagbo du fond de sa prison à la Haye, en Hollande, se souviendra, pour le peu de temps qu’il lui reste à vivre du Capitaine para commando Blaise Compaoré. Il envoya 500 soldats Burkinabés pour aider le gouvernement de Gbagbo à sécuriser les élections, ces soldats rejoindront le camp Ouattara pendant la crise électorale et deviendront des éléments de sa garde prétorienne lorsqu’il entra au palais présidentiel du plateau d’Abidjan.Blaise Compaoré considère toute négociation comme une inacceptable tentative d’extorsion. Devenu fort il considère tout compromis comme un don gratuit. Voilà pourquoi la justice burkinabé n’éclaircira jamais les conditions tragiques de la mort de Thomas Sankara et de ses collaborateurs. Stratège de l’ambiguïté, Compaoré ne laisse jamais l’interlocuteur deviner ses sentiments pendant une rencontre. Distant, il n’entre jamais le premier dans le vif du sujet laissant le visiteur deviner ou spéculer. Cela lui donne le temps de jauger l’interlocuteur. Ceux qui l’on fréquenté disent que c’est un négociateur imprévisible et retors, capable, tout aussi bien de trancher un problème de fond à la hussarde et refuser une réponse précise sur une question de détail. S’il lui arrive de vous dire non, ce qui est rare de dire non catégoriquement. Dans ce cas il ne sert à rien d’insister car sa décision est définitive du moins pour le moment.Car chez lui, tout refus dissimule parfois les prodromes d’une acceptation future comme toute acceptation recèle les fondements d’un éventuel rejet. On appelle cela la duplicité, la dissimulation, le dédoublement, la ruse, la roublardise ou technique avancée de négociation, c’est dans cette manche qu’il laisse son Ministre des affaires étrangères et homme de confiance, le soin de jouer à l’Henry Kissinger des tropiques.Le futur nous donnera l’opportunité d’être plus précis sur ce type de comportement. Il est passé maître dans l’art de la manœuvre, il pratique la politique du bord du gouffre et sait s’arrêter au bon moment, juste avant le précipice. Homme d’imprévisibilité, Compaoré, est capable de prendre la bonne décision au moment ou on pense que tout est perdu pour lui. L’affaire Zongo, et les récentes mutineries sont sous nos yeux pour démontrer sa capacité à rebondir pour atterrir sur ses deux pieds.L’ensemble de toutes ces observations nous permettent de dire tout simplement ici que de tous ceux qui ont tué pour arriver au pouvoir, Compaoré, est le plus féroce d’entre eux. Mobutu, Eyadema et Samuel Doé, réunis, sont des anges qui ne valent pas la cheville de Blaise Compaoré, l’actuel Parain de la sous région Ouest africaine.

Des images de Blaise avec les différents acteurs de la crise ivoirienne qui résument à elles seules l'ambiguïté et l'imprévisibilité du Capitaine Blaise Compaoré.

II – De la Doctrine Compaoré, Parlons-en
 Sur le fond, Blaise Compaoré a développé dans le cadre de la crise ivoirienne une doctrine presque inédite et ambitieuse ; pour la mettre en œuvre, il forge un outil opérationnel que l’on peut qualifier de jeux ouvert ou de pont ouvert. C’est la doctrine Compaoré, qui présente les trois visages de la recomposition de l’Afrique de l’Ouest. Occupant, protecteur, médiateur ou Stabilisateur.
Elle repose sur trois principes d’actions implicites dans les relations entre Etats :
1) – Le droit d’un pays africain voisin d’intervenir militairement de façon masquée sur le territoire d’un autre Etat afin de l’empêcher – lui-même ou des organisations agissants en son sein de menacer la paix et la sécurité de la sous région et du Burkina Faso en particulier.
2) – pour rappelle, la Tanzanie avait recouru à cette méthode pour chasser Idi Amin Dada du pouvoir en Ouganda, le 11 avril 1979, car il menaçait la stabilité de toute l’Afrique orientale. Mais dans ce précédant c’est l’armée ougandaise qui avait envahi une province tanzanienne à la poursuite des opposants à son régime criminel.
3) – le Droit pour un état voisin de prendre les mesures appropriées pour veiller à la sécurité collective de la sous région si le gouvernement voisin est défaillant ou représente un danger pour la vie économique et politique du Burkina Faso.
4) – Ou alors de prendre en main directement et avec l’autorisation préalable des puissances extra africaines les affaires d’un voisin en affirmant ainsi sa vocation de puissance régionale. Intervenir et offrir sa disponibilité dès qu’une situation locale peut dégénérer et affaiblir toute la sous région. C’est une façon intelligente de tirer les marrons du feu, face à l’équation régionale.
Pour ce qui est du jeu ouvert qui est une composante de la doctrine Compaoré, dont nous avons fait état plus haut, il consiste tout d’abord à geler un conflit dont la solution définitive semble hors de portée, du moins dans l’immédiat, en laissant aux parties en cause le soin de s’épuiser et toute la latitude de défendre leurs positions de principe ou leur thèses idéologiques.Ainsi au lieu de rechercher la solution définitive qui conduirait à la fin du conflit ouvert, il dégage un règlement provisoire qui satisfait plus ou moins les principaux antagonistes en attendant que les rapports de force changent. Mais surtout, il fait en sorte qu’avec le temps ce provisoire prime. L’asile accordé au Capitaine Moussa Dadis Camara et la longue crise ivoirienne ainsi que son dénouement tragique entrent dans cette logique qui permet de mieux comprendre le pont du jeu ouvert, qui sous-tend la doctrine Compaoré.Ainsi, plus le problème est complexe, plus les revendications sont inconciliables et plus la solution provisoire apparaît acceptable par tous. En laissant la solution dite définitive s’éloigner pour être à la fois théorique et chimérique. Cela permet à Blaise Compaoré, le pompier pyromane et à son pays de profiter de la guerre chez les autres et d’apparaître aux yeux du monde en sauveur.Des Comptoirs de diamants à Ouagadougou pendant la crise du Libéria et de la Côte d’Ivoire. Le Burkina désertique, est devenu exportateur de bois, de café et de Cacao pendant la crise ivoirienne, il n’y a que ceux qui ont un gros cailloux dans leur tête qui n’ont pas encore compris le pont du jeu ouvert qui est la colonne vertébrale de la << doctrine Compaoré.>>" 

Dr Serge-Nicolas NZI
Chercheur en Communication
Lugano ( Suisse)
Mail : nzinicolas@yahoo.fr
Source: www.connectionivoirienne.net

PS: Les autres points tels que: Relations avec les voisins du Burkina Faso (III), Les Ambitions de Compaoré (IV) et Postulat de conclusion générale (V) vous seront proposés ultérieurement.


 Sourire du jour





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