Comme je le disais dans la précédente publication "Blaise Compaoré ou le Parrain de la sous-région (1), ce qui suit est la suite de l'article du Dr Serge Nicolas Nzi, intitulé "Compaoré ou le tueur froid de Ouagadougou" mis en ligne sur le site connectionivoirienne.net. J'ai décidé de reprendre cet article dans son intégralité, mais en deux (2) phases. Dans la première partie, j'ai évoqué deux (2) aspects: Le Portrait pour connaître l'homme Compaoré (I), De la doctrine Compaoré, parlons-en (II). Dans cette seconde partie, la dernière, il est question des points comme: Les Relations avec les voisins du Burkina Faso (III), Les Ambitions de Compaoré (IV) et une Conclusion Générale (V) savamment tirée par le Dr Nzi, a qui je voudrais dire merci. Merci pour l'analyse très profonde de la situation politique, disons la Realpolitik, de la sous-région, pour, en somme, cet article assez instructif, en tout cas pour moi, en tant que jeune burkinabé en particulier et ouest-africain en général.
NB: Je précise qu'en dehors des photos d'illustration, le sourire du jour et des légendes, tout le reste est du Dr Serge Nicolas Nzi. Article mis en ligne sur le site www.connectionivoirienne.net le 25 juillet, 2013 à 21:00
"Compaoré ou le tueur froid de Ouagadougou
III –
Relations avec les voisins du Burkina Faso
Le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire constituaient une
même colonie jusqu’en 1947. Ce pays dépend de la Côte d’Ivoire pour son
ouverture sur la mer ainsi que pour ses importations et exportations. C’est
suite à l’arrogance, la désinvolture d’Henri Konan Bédié, et de son ministre de
l’intérieur le Colonel Emile Constant Bombet, après la chasse aux burkinabés
résidant dans le sud- Ouest de la Côte d’ Ivoire, que le tueur froid de
Ouagadougou avait décidé de soutenir un changement de régime chez son voisin. Fort
heureusement il a trouvé en Côte d’ivoire une classe politique versatile pour
l’aider à atteindre ce but. C’est ainsi que les mécanismes de l’instabilité et
du changement se sont durablement installés en Côte d’Ivoire.
Un changement qui
sécurise le Burkina Faso. Un changement de régime pour mettre un homme
favorable au Burkina Faso à la tête de la Côte d’Ivoire. La suite de
l’histoire, nous la connaissons ce fut le putsch du 24 décembre 1999 qui
plongea la Côte d’Ivoire dans une l’instabilité politique chronique. Compaoré
nourrit un profond mépris pour l’ancien président ivoirien Henri Konan Bédié,
le père de l’ivoirité, qu’il considère comme un paresseux, un petit jouisseur
et un parvenu. Ayant collaboré avec Félix Houphouët-Boigny, sur plusieurs
dossiers sous régionaux il se considère aussi comme l’un des héritiers de la
sous-traitance politique de la France dans cette partie de l’Afrique. Il n’aime
pas les orateurs pétris de dialectique. Compaoré, parle peu et agit, il est le
contraire de Thomas Sankara ou de Gbagbo Laurent. Il se méfiait justement de
Gbagbo, de sa roublardise, de ses voltes face et surtout du nationalisme, de la
refondation patriotique, indépendantiste et souverainiste qu’il représente. Il
est convaincu que la Côte d’Ivoire dirigée par Alassane Ouattara aidera mieux
le Burkina Faso et résoudra surtout le problème de la nationalité des
Burkinabés qui désirent s’installer en Côte d’Ivoire et avoir des droits de
citoyen dans ce pays qu’ils ont contribué à bâtir. Avec le Mali, Compaoré, qui
est militaire et connaît la nature exacte des rapports de force, respecte le
discret voisin malien, il sait ce que la guerre de La bande d’Agacher de
décembre 1974 et celle de décembre 1985, avaient coûté au Burkina Faso. Ce sont
des signes qui ne trompent pas. Il ne peut que coopérer loyalement avec ce
pays. Avec le Togo, qui est un partenaire économique il souhaite que ce voisin
soit stable car toute dégradation de la situation politique, économique,
militaire et institutionnelle dans ce pays aura des conséquences néfastes et
incalculables sur ce pays enclavé qu’est le Burkina Faso.
Compaoré en super médiateur dans la crise malienne recevant les représentants d'un des mouvements islamistes |
Compaoré (à droite) recevant une distinction des mains du Président par intérim du Mali. |
C’est dans cet esprit
qu’il offre sa médiation aux protagonistes de la crise togolaise. Le Burkina
Faso n’a pas de frontière commune avec le Sénégal, la tradition démocratique de
ce pays stable depuis son indépendance et la méfiance naturelle des sénégalais envers tous ceux qui tuent pour exister, font que Compaoré, a des rapports de
simple courtoisie avec la classe politique Sénégalaise. Mais s’il a l’occasion,
il n’hésitera pas à jouer le faiseur de roi dans ce pays. Avec le Niger voisin
il a des liens d’amitiés et de complémentarités économiques. Il est attentif à
ce pays frère et cherche à influer sur sa vie politique dans le cadre de
rapports de bon voisinage. Le Ghana reste pour Blaise Compaoré, un pays avec
lequel il coopère en bonne intelligence, il sait que les ghanéens le
connaissent et haïssent ses méthodes. Le Ghana n’est pas la Côte d’Ivoire. Il
n’y aura jamais un cheval de Troie ou un ministre d’origine burkinabé dans le
gouvernement du Ghana. C’est un pays qui n’hésitera pas à fermer ses frontières
avec le Burkina Faso s’il découvre une seule arme dans un véhicule Burkinabé
entrant au Ghana. C’est un pays qui a sa propre Banque centrale, sa propre
monnaie et se tient loin des compromissions qui conduisent à la faillite
nationale. Le Ghana n’appartient pas non plus au pré carré de la françafrique.
L’influence de la France sur ce pays est nulle. Compaoré, se trouve obligé de
respecter et de composer avec ce voisin dans une posture de respect mutuel,
comparable aux relations franco-allemandes.
Compaoré ou l'autre visage de la fameuse et tentaculaire FrançAfrique |
IV – Les
Ambitions de Compaoré
Proche des loges et réseaux maçonniques il est très
attaché à la droite Française, il pense que l’Europe en construction doit être
un recours, si non une soupape de sûreté pour l’immense Afrique qui se trouve
près d’elle dans une sorte d’alliance de progrès durable. Cette ambitieuse
politique internationale se propose d’abord de transformer le Burkina Faso d’enjeu
en acteur et d’en faire ainsi une grande puissance régionale. Jusqu’en 1987
date de l’accession au pouvoir de Blaise Compaoré à la présidence du pays des
hommes intègres, la sous-région Ouest africaine oscillait entre trois pôles
d’attractions Le Nigeria, Le Sénégal et la Côte d’Ivoire. L’ancienne Haute
Volta se bornait à faire pencher la Balance du Côté de la Côte d’Ivoire et de
son chef, l’ancien président Du Rassemblement démocratique africain Félix
Houphouët-Boigny. Une fois la Côte d’Ivoire isolée grâce à l’irresponsabilité
et à l’inconscience de sa classe politique, le Sénégal relégué au second rang,
le Burkina Faso n’a jamais connu autant d’influence et de stabilité que sous
celui que ses courtisans appelle le beau Blaise Compaoré, le tueur froid de
Ouagadougou. Mais le revers de la médaille est que le Burkina Faso, est un pays
qui vit dans un Etat de siège invisible à l’œil nu. Une armée acquise à sa
cause et mobilisable pour ses basses politiques, lui a permis de se maintenir
aussi longtemps de 1987 à 2013 (Ndlr) soit près d’un quart de siècle avec un
dessein de cette ampleur, nous constatons ici qu’une grande politique de cette
nature pour un petit pays ne va pas sans excès. Compaoré se montre impitoyable
à l’intérieur.
"Les premiers le traitent d’usurpateur et de combinard. Les seconds voient en lui un assassin, un traitre de la révolution et au socialisme africain. "
Les apparences d’un certain libéralisme économique ne cachent
pas sa capacité à sévir si on s’avance trop près de ses intérêts politiques et
mercantiles. Son régime est combattu de l’intérieur sur sa droite et sur sa
Gauche. Les premiers le traitent d’usurpateur et de combinard. Les seconds
voient en lui un assassin, un traitre de la révolution et au socialisme
africain. Il se réserve la carte du nationalisme et du radicalisme face aux
ennemis intérieurs et extérieurs en disant pendant la dernière campagne
électorale que les droits des Burkinabés vivants en Côte d’Ivoire seront
respectés quoi qu’il advienne. Le nouveau président Ivoirien Alassane Ouattara
avait déclaré lors de son récent passage à Ouagadougou, que chaque Burkinabé
qui arrive en Côte d’Ivoire est chez lui. Il connaît sans doute mal Blaise
Compaoré. Il aura du mal à déployer la police, la douane et la gendarmerie
ivoirienne aux frontières avec le Burkina. Car le parrain, Blaise Compaoré,
veut continuer à exporter du Cacao, du café du diamant, du bois et du coton de
Côte d’Ivoire. S’il s’amuse à refuser un tel marchandage qu’il sache à l’avance
que le tueur froid de Ouagadougou a toujours deux ou trois fers au feu. Compaoré,
sait qu’en Côte d’Ivoire les alliances se font et se défont tous les matins,
les ivoiritaires d’hier n’embrassent-ils pas les Allassanistes sur la bouche
aujourd’hui et ne dînent-ils pas à la même table que leurs pires ennemis d’hier
? Baisse la tête et adore ce que tu brûlais hier, disait Clotilde, à Clovis le
roi de France converti au christianisme. N’est-ce pas dans ce Burkina Faso
qu’ils méprisaient que les politicards ivoiriens après toute honte bue, sont
allés quémander goulûment comme des bébés, l’arbitrage du beau Blaise pour
régler leurs querelles de clocher qu’ils étaient incapables de résoudre chez
eux ? C’est dans ce registre de continuité dans la durée que Compaoré va
tripatouiller la constitution et se présenter pour la énième fois aux
élections. Les divisions de ses opposants et la fragilité économique du pays,
le soutien de la France et des autres chefs d’Etats africains qui lui sont
redevables l’aideront à se succéder à lui-même avec un score à la soviétique
pour le bonheur d’un Burkina Faso qui compte sur l’échiquier régional.
V –
Postulat de Conclusion Générale
Les sociétés humaines évoluent par contradiction.
Faut-il rappeler que les animaux évoluent par instinct. Tuer la contradiction
dans une société humaine et vous feriez le constat 50 ans après que le même
peuple est toujours dans la crasse, la pauvreté, la maladie, dans des tueries
sanglantes, des détournements de fonds publics, des meurtres et des génocides. Des
pays où il n’y a pas de l’eau potable, des pays où l’espoir ne pousse plus car
il n’y a aucune contradiction pour animer et susciter la quête d’un horizon
meilleur.
"L’image de Thomas Sankara, prenant plusieurs balles de Kalachnikovs dans le ventre, alors qu’il n’était même pas armé, son agonie dans la poussière sans le moindre secours, pendant de longues minutes sous les yeux de ceux qui hier encore mangeaient à la même table que lui, reste pour tous les africains un crime crapuleux impardonnable."
C’est ainsi que la médiocrité a durablement triomphé chez nous pour
occuper une place de choix dans notre rapport avec la chose publique. L’asservissement
et l’avilissement des hommes et des femmes ont favorisé la promotion de la
médiocrité que nous avons eu comme compagnon de route depuis l’indépendance
jusqu’à ce jour. Pourquoi s’étonner dans ces circonstances du délabrement de
l’ensemble des pays africains de l’espace francophone et surtout de notre
amertume de fils de peuples désespérés. Nous avons toujours pensé qu’une vie de
crimes se paie au prix fort ici-bas. C’est pourquoi nous n’étions pas contre la
personne du dictateur camerounais Amadou Ahidjo, dans cette logique nous
savions à l’avance que le Zaïrois Mobutu, courait à sa propre perte avec ses
certitudes et ses airs de maréchal d’opérette. Nous rappelons à Blaise
Compaoré, que nous ne sommes pas de ceux qui convoitent son fauteuil. Celui qui
écrit ces lignes n’est même pas Burkinabé. Nous sommes simplement aujourd’hui
dans une époque où le meurtre gratuit comme forme de gouvernance a montré ses
limites en nous laissant des souvenirs douloureux qui hantent encore nos nuits.
L’image de Thomas Sankara, prenant plusieurs balles de Kalachnikovs dans le
ventre, alors qu’il n’était même pas armé, son agonie dans la poussière sans le
moindre secours, pendant de longues minutes sous les yeux de ceux qui hier
encore mangeaient à la même table que lui, reste pour tous les africains un
crime crapuleux impardonnable. Nous n’avons aucun conseille ni supplication à
adresser au beau Blaise Compaoré. Nous lui offrons simplement en cadeau, la
cassette vidéo du dernier jour de vie de Samuel Doe. Ce 9 septembre 1990,
L’homme qui avait fait exécuter sans pitié, le 12 avril 1980 le président
William Tolbert, et les membres de son gouvernement dans Monrovia en folie. Samuel
Doe, était assis par terre en petite tenue, pleurant toutes les larmes de son
corps. Ses oreilles et les doigts coupés, pitoyable, il chialait, implorait et
suppliait son bourreau et maître du jour, Prince Yormi Johnson, d’avoir pitié
de lui. Cette pitié et cette humanité qu’il n’avait pas eu en son temps pour
les autres. Le corps de Samuel Doe, fut exposé nu dans les rues de Monrovia
avant d’être dépecé comme un sanglier et brûlé. Nous n’ajoutons aucun
commentaire sur ces faits connus de nous tous. Dans le présent, la sous-région
Ouest Africaine, a besoin de paix, de stabilité de complémentarité des
économies, de conjugaison des synergies, pour créer des infrastructures
routières communes, pour organiser notre propre activité de production,
partager les ressources énergétiques, créer une monnaie capable d’assurer notre
indépendance économique, former notre jeunesse afin de lui donner les armes
pour relever les défis du futur et non des armes pour tuer.
Réorienter notre agriculture afin de satisfaire nos
besoins en nourriture au lieu d’aller pleurnicher sur nos problèmes à Paris, à
Londres ou en Chine. Soigner nos populations contre les épidémies et autres
pandémies. Bref rendre la vie et la dignité possible chez nous aussi. Telles
sont les équations urgentes qui méritent l’attention de tous ceux qui veulent
que la vie politique sous nos cieux soit au service du progrès social et démocratique,
du bonheur et du bien-être de cette sous-région en souffrance qu’est l’Afrique
de l’Ouest. Telles sont aussi les observations critiques que nous formulons à
l’endroit du beau Blaise Compaoré, pour que le pouvoir ne soit plus une machine
à tuer et s’humanise au Burkina Faso afin de présenter le visage d’un service
au bénéfice des habitants de la patrie de hommes intègres.
Cette
vieille chanson paysanne des montagnes du Venezuela résume mieux encore notre
propos.
"Se
puede matar el hombre Pero no mastaran la forma En que se alegraba su alma
Cuando sonaba ser libre"
"Ils peuvent tuer l’homme, mais ils ne
peuvent tuer la façon dont son âme se réjouit lorsqu’elle rêve d’être libre"C’est cette espérance sincère que nous avons voulu partager avec tous ceux qui comme nous refusent le meurtre comme forme de gouvernance dans la vie politique africaine. Merci de votre aimable attention. "
Dr Serge-Nicolas NZI
Chercheur en Communication
Lugano ( Suisse)
Mail : nzinicolas@yahoo.fr
Lugano ( Suisse)
Mail : nzinicolas@yahoo.fr
Source: www.connectionivoirienne.net
Sourire du jour
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